La journée nationale 2014 de l’association s’est déroulée avec succès le 11 octobre 2014 à Montpellier malgré les intempéries.
Le groupe « Fratrie » s’est réuni et les échanges sur leur vécu ont été riches. Vous retrouverez une restitution de ce qui s’est dit en cliquant sur « lire la suite » à la fin de cet article.
Vous pouvez aussi retrouver l’ambiance de la journée à travers la galerie de photos en cliquant sur le lien suivant :
A.G. Prader-Willi France 11.10.2014
Nous préparons un numéro spécial pour vous restituer le contenu des conférences et la richesse des échanges : vous les rappeler si vous étiez là, les mettre à votre disposition si vous n’avez pas pu venir. Il paraitra début 2015.
Cliquer sur lire la suite pour consulter le compte-rendu de la discussion du groupe fratrie :
Compte-Rendu de la réunion fratrie de Montpellier
L’Assemblée Générale de Montpellier fut une nouvelle occasion à quelques-uns des frères et sœurs de personnes avec le syndrome de Prader-Willi de se réunir. Comme pour chaque rencontre, j’organise un premier tour de table où chacun et chacune se présente. Les fratries sont très hétéroclites encore une fois : enfants, adultes, filles, garçons, aînés, cadets… Et pour la première fois, nous accueillons des professionnels d’Hendaye qui souhaitent entendre notre témoignage.
La discussion démarre très vite sur la difficulté à trouver sa place dans une famille un peu bousculée par le syndrome. Alors que, dans la plupart des familles, une hiérarchie se met en place en fonction de l’âge des enfants, dans les fratries où un des enfants est atteint d’une maladie, cette hiérarchie tend à être bouleversée. Certains cadettes et cadets se retrouvent à acquérir plus de responsabilités que leur aîné(e) handicapé(e), voire à être par moment responsable de cet(te) aîné(e).
Là il y a comme un malaise : ai-je le droit de prendre la place de mon frère/ma sœur aîné(e)? Comment puis-je le/la protéger sans le/la déposséder de son rôle? Ces questions se construisent au fil du temps et de la prise de conscience du fonctionnement inhabituel de la famille. Les plus jeunes, quant à eux, ne se posent généralement pas ces questions et envisagent plutôt cette responsabilité comme naturelle.
La responsabilité a été le fil conducteur de la discussion. Car naturellement, un mécanisme se met en place. L’enfant atteint du syndrome de Prader-Willi devient celui qu’il faut particulièrement aider, protéger, à qui on doit faire plus attention ; que ce soit de la part des parents ou des autres enfants.
Si pour les parents cette responsabilité n’est pas tous les jours facile et agréable, il en va de même pour les fratries. Il n’est pas forcément agréable de devoir penser à la sécurité et au bien-être de son frère ou de sa sœur dans les activités que nous partageons avec lui/elle.
De plus la surveillance accrue de l’alimentation et parfois une diabolisation de certains aliments conditionnent notre propre relation à la nourriture. Comment gérer la culpabilité de manger un Mars lorsque son frère n’en a pas le droit ? Comment gérer sa propre frustration et les interdits que nous impose le régime de notre sœur et se raisonner sur le bien-fondé de respecter ces contraintes face aux copains qui nous narguent avec leur dernière visite dans un fast-food ? La responsabilité de nos actes de la vie courante, quand elle est liée à la culpabilité par rapport à son frère ou sa sœur n’est pas simple pour les enfants qui ne savent pas trop s’ils ont le droit ou pas de se plaindre.
Cette responsabilité peut être accrue par les comparaisons que nous font nos Prader-Willi : « Pourquoi elle a une cuillère en plus que moi dans son assiette ? », « Moi aussi ce soir je veux aller dormir chez mon amie comme lui ! », « Je ne veux pas aller me coucher maintenant si elle peut regarder le film à la télé ! ».
Les différences que leur maladie leur impose les révoltent et leur volonté d’avoir les mêmes droits et devoirs que nous, nous obligent à revoir les nôtres à la baisse ou à tricher.
Combien de fratries ont l’autorisation d’avoir une cachette à nourriture, combiens d’adolescents feignent de se coucher à 20h comme leur frère ou sœur « Prader-Willi » pour se relever le plus discrètement du monde une fois qu’ils dorment ? Néanmoins, comment justifier notre énervement face à ces situations alors que notre frère/sœur n’a pas demandé à avoir un rythme de vie différent du notre ? Devons-nous devenir plus responsable par rapport à nos envies pour ne pas les rendre jaloux ?
Leurs limites posent aussi la question du jeu et des interactions entre les fratries. Il est difficile de jouer d’égal à égal lorsqu’un membre de la fratrie est atteint d’une déficience mentale. Soit, on abandonne l’idée de jouer avec lui, choisissant d’autres types d’interactions (promenades, cinéma, sport…), soit on prend le rôle de l’ « animateur ». Certains frères ou sœurs sont particulièrement investis dans cette démarche où ils occupent, voire stimulent leur frère ou sœur « Prader-Willi ».
Avec l’arrivée de l’âge adulte, des questions se posent quant à notre propre évolution et à notre vie d’adulte : « Moi aussi quand j’aurai 18 ans je pourrai passer le permis et avoir une voiture ? », « Quand Est-ce que je pourrai avoir mon appartement comme mon frère ? » nous disent nos « Prader-Willi ». Un dilemme s’installe alors entre la volonté de vivre sa vie et celle de vouloir la même chose pour son frère ou sa sœur. Nous devenons « responsables » de leur envie d’évoluer et de s’émanciper, nous sommes des « modèles », un statut qu’il est parfois difficile d’assumer.
Pour finir, la discussion s’est tournée vers ce que je nommerais avec humour comme « la tyrannie des Prader-Willi ». En effet, les fratries font généralement le constat d’une vie familiale centrée autour des contraintes de la maladie : rythme du quotidien, régime, omniprésence du médical à la maison, humeur générale de la famille en fonction des colères… Difficile pour les fratries de faire entendre leurs propres envies, désirs, colères lorsque le « Prader-Willi » se les accapare. Il faut se lever, se coucher, se balader à son rythme, suivre son régime alimentaire, s’adapter à son humeur, sa fatigue et ses envies. Parfois, cela nous semble trop car on demande plus rarement aux « Prader-Willi » de s’adapter à leurs autres frères et sœurs.
Peut-être est-ce plus dur pour eux que pour nous. Mais ils nous prouvent tous les jours qu’ils ont envie d’être considérés comme tout le monde et qu’ils en sont capables !
Merci Barbara pour cette restitution si vivante et si éloquente!
A travers ce témoignage, on prend vraiment conscience de toutes les dimensions des situations des frères et soeurs !
Bravo pour l’intensité de votre atelier et pour avoir su nous la faire partager.
à bientôt
Cet article est d’une grande qualité mais surtout d’une grande vérité.
Cela est notre quotidien, nous n’avons pas le choix, il faut faire avec. Je voudrai rajouter que nos enfants Prader Willi n’ont pas beaucoup de place dans ce monde(l’école, le sport, les loisirs rien n’est adapté).