Avant que vous ne commenciez à lire ce texte, je voudrais remercier les équipes du centre de référence du syndrome de Prader-Willi, et des centres de compétences, les chercheurs, les médecins (généralistes, endocrinologue, pédopsychiatres, psychiatres…….), les psychologues, les diététiciens, les MDPH, les ARS, les Conseils Généraux, les C.M.P, les C.M.P.P, les I.M.E, les E.S.A.T, les foyers de vie, etc., etc. qui sont à notre écoute et font un travail formidable avec et pour nos enfants. Nous n’avons jamais l’opportunité de leur dire notre gratitude pour l’accompagnement qu’ils réalisent.
Malheureusement, si nombre d’entre eux s’investissent sans compter, d’autres se ferment devant l’inconnu et/ou les difficultés propres au syndrome (comme pour d’autres pathologies rares, peu connues également).
Depuis quelques mois, je reçois au titre d’écoutant, des appels de parents ayant un fils ou une fille (ou un proche) atteint du syndrome de PW.
Force est de constater que majoritairement, ce sont des appels à l’aide, plus que des demandes de simples renseignements.
Depuis leur naissance, nos enfants subissent le regard « terrible » des autres. Des regards blessants, voire humiliants qui les fixent et leur disent « tu es autre et j’ai peur de ta différence ».
Nous, parents, nous les protégeons, nous les surprotégeons … qui peut nous le reprocher ? Nous les avons désirés nos enfants, ils sont là et nous les conduisons dans un monde qui dit accepter la différence alors qu’il n’en est rien. Ils sont intelligents et se rendent compte de leur différence, ressentant nos joies comme nos peines. Ils sont aussi très à l’écoute de nos réactions.
Nous vivons des moments difficiles voire très difficiles, mais cette souffrance est d’abord le miroir de leur propre souffrance.
Nous savons que le chemin de la vie ne sera pas le même pour eux, que pour les autres. Quand ils regardent leurs frères et soeurs ou d’autres personnes, ils ne les fixent pas, et parfois ils fuient leur regard, baissant la tête pour parler, mesurant leur incapacité à communiquer avec les autres.
Les « belles paroles » ne se transforment malheureusement pas en actes. Le handicap (sauf si il est physique) est encore difficilement accepté.
L’actualité de ces derniers mois nous montre que les parents de jeunes adultes et d’adultes rencontrent de grandes difficultés pour trouver un lieu de vie avec un entourage qui les accepte, un lieu où on les respecte, les comprenne, leur donne de la joie et du bonheur. Nous voulons un endroit où ils peuvent vivre heureux. Malheureusement le chemin est long.
Des enfants, des adolescents et des adultes atteints du syndrome, sont en souffrance et se trouvent parfois dans des situations désespérées à cause de l’attitude de certaines personnes.
Après leur vécu et ce cumul d’agressions morales, ne peut-on pas comprendre l’origine de leurs crises de colères voire parfois de violences ? Je ne dis pas accepter, mais essayer de comprendre.
Nous pouvons les comparer à des volcans qui après un cumul de gaz et de magma, entrent en éruption. L’élément déclencheur de la crise peut paraître parfois anodin mais il surgit probablement après un cumul devenu insupportable.
Certains établissements comme des IME, ESAT, foyers, recevant nos enfants, ne les comprennent pas, ne veulent pas faire l’effort de connaître ce syndrome si complexe et vont parfois jusqu’à les exclure en raison de leur comportement …… D’autres refusent même tout simplement de les accueillir.
Notre vécu de parents, individuel et collectif à travers l’association, ne doit pas être considéré comme un obstacle à l’accompagnement, mais doit être reçu comme une connaissance permettant une meilleure compréhension de nos enfants.
Par exemple, quelques attitudes que nous avons compris en vivant avec eux :
- avancer et réfléchir à chaque étape.
- ne pas vouloir franchir trop vite des paliers car cela risque de mener à l’échec….tel un grand escalier avec de hautes et larges marches (cette impression quelquefois de ne pas avancer…jusqu’à subitement gravir la marche supérieure).
- attendre que chaque cap soit consolidé.
- anticiper et expliquer chaque étape.
- rechercher et identifier leurs points forts.
- savoir valoriser nos enfants devant chaque progrès
Dans certains hôpitaux on peut entendre encore des « horreurs » …. Il est difficile de comprendre ces attitudes. La maladie est maintenant connue, il existe un centre de référence, un PNDS et malgré cela, les recommandations ne sont pas entendues.
Que sont devenues ces phrases du serment d’Hippocrate ?
« Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux »
« Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté»
« Je ferai tout pour soulager les souffrances »
« Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés» ….
Souhaitons qu’un jour on puisse accepter de ne pas tout « savoir » pour être enfin plus à l’écoute des gens et de leur vécu. Si ce rêve se réalise nous aurons enfin compris la définition d’un simple mot : « le respect »<
Lorsque nous sommes tous montés un jour à bord du grand voilier baptisé « Prader-Willi », aucun de nous ne savait vraiment où il nous mènerait. Comme pour toutes les grandes transats, nous rencontrons des mers calmes mais aussi des tempêtes déchaînées, des moments de découragement et de belles journées de joie … une seule certitude commune : nous voulons et nous réussirons à mener notre bateau à bon port et pour cela nous formons un équipage uni pour tenir le cap.
Jacques Leblanc
« Savoir, c’est ne pas savoir, et comprendre que jamais le savoir ne peut résoudre nos problèmes humains, c’est l’intelligence. » citation de Jiddu KRISHNAMURTI