Les travaux de recherche portant sur le syndrome de Prader-Willi sont très importants dans le monde. Nous avons la chance en France d’avoir des équipes extrêmement compétentes et motivées. Vous avez pu prendre connaissance des travaux de recherche fondamentale menés par l’équipe du Dr. Françoise Muscatelli. Le Pr. Maithé Tauber a synthétisé dans le texte ci-après les travaux
poursuivis par le centre de référence du syndrome de Prader-Willi. Notre association soutient et continuera à soutenir chaque fois que cela est nécessaire et dans la limite de ses possibilités ces efforts porteurs d’espoir pour nos enfants et leurs familles.
Merci donc à toutes ces équipes et merci à toutes et tous pour vos dons qui permettent ce soutien et encouragent ces
recherches.
François Besnier
Le centre de référence du SPW développe une large activité de recherche variée, épidémiologique, physiopathologique et thérapeutique.
Recherche épidémiologique et cohortes
La mise en place de notre base de données a permis de publier deux articles, dont un troisième est en cours de rédaction, sur les pratiques cliniques et les modifications de ces pratiques. Notre prochaine publication va porter sur les effets de la mise en place précoce d’un traitement par hormone de croissance à partir des données « enfants » de notre base.
Les données concernant l’effet de l’hormone de croissance chez les adultes SPW ayant reçu un traitement par hormone pendant l’enfance ont été analysées par l’équipe de la Pitié-Salpêtrière et publiées en 2013 (Coupaye et coll).
L’équipe « adultes SPW» de la Pitié (M. Coupaye et C. Poitou) en collaboration avec le Centre de Référence des Pathologies du Sommeil (Pr Arnulf) travaille sur l’analyse des caractéristiques pneumologiques (EFR) et sommeil (polysomnographie et TILE) chez 50 adultes enregistrés ces 3 dernières années. Une publication est en cours.
L’équipe « adultes SPW » de l’hôpital marin de Hendaye a publié ses travaux sur les fonctions cognitives et exécutives en 2013 également (Chevalere et coll.), d’autres articles sont soumis.
Recherche clinique dans le cadre de Programmes Hospitaliers de Recherche Clinique (PHRC)
Trois PHRC nationaux sur le SPW sont en cours
– un PHRC sur la sensibilité à l’hormone de croissance (GH pour growth hormone en anglais) chez les enfants SPW comparée à celle des enfants présentant un déficit en GH d’une autre cause (obtenu en 2008, investigateur M. Tauber). 47 enfants SPW ont été inclus et 32 enfants avec déficit en GH. Grâce à ce PHRC nous avons pu obtenir une banque de cellules, fibroblastes cutanés, cellules adipeuses et cellules souches de patients SPW et de patients contrôles appariés.
– un PHRC sur le topiramate, étude TOPRADER (obtenu en 2010, débuté en 2012, investigateur O. Bonnot). Les inclusions ont commencé à Paris et vont bientôt démarrer à Toulouse et à Hendaye. Il s’agit d’étudier les effets du topiramate sur les troubles du comportement chez l’enfant et chez l’adulte SPW.
– un PHRC, étude ANASILPRA (obtenu en 2010, débuté en 201, investigateur I. Netchine, responsable scientifique M. Tauber), sur l’utilisation d’un inhibiteur de l’aromatase chez les enfants qui présentent une adrénarche (pilosité pubienne) précoce et agressive. Il s’agit soit d’enfants SPW, soit d’enfants avec un syndrome de Silver-Russel (maladie rare soumise à empreinte, avec des troubles du comportement alimentaire précoce, adrénarche précoce ou agressive, concomitante d’une prise de poids excessive). 25 enfants SPW devront être inclus dans cette étude. 6 enfants au total ont été inclus à Paris par le Dr G. Pinto et à Toulouse par le Dr G Diène.
Deux programmes de recherche sur l’ocytocine sont en cours à Toulouse, avec un financement local par le CHU
L’ocytocine est une « vieille hormone » connue depuis longtemps pour ses effets sur l’accouchement et la lactation. L’ocytocine agit également sur le cerveau comme un neurotransmetteur, en particulier sur le comportement, l’attachement au partenaire et sur la relation entre parents et enfants. De plus, elle contrôle l’appétit en agissant au début de la vie, probablement sur la succion et plus tard sur la satiété.
Le centre de référence du SPW a publié en 2011 le premier article mettant en évidence un effet bénéfique de l’ocytocine sur le comportement chez 12 patients adultes SPW qui avaient reçu une administration d’ocytocine par pulvérisation nasale.
Une première étude de tolérance chez les bébés SPW a été réalisée en 2011 et a montré sur 5 bébés âgés de 1,5 mois à 3,5 mois que l’ocytocine était bien tolérée et semblait améliorer la succion et les interactions mère-enfant.
Ainsi les études avec administration répétée d’ocytocine (OT) peuvent être débutées.
Chez les bébés avec SPW (de 0 a 5 mois) : étude de l’administration répétée d’OT par voie intranasale pendant 8 jours. L’étude a débuté le 13 mai 2013 à l’hôpital des enfants de Toulouse. Il s’agit d’une étude dont le promoteur est le CHU de Toulouse et qui va inclure 18 bébés SPW sur 18 mois, si trois paliers de dose sont réalisés.
Chez les adultes : le projet qui a reçu un financement de la fondation américaine et canadienne pour la recherche sur le SPW (opération puzzle) a été proposé au CHU de Toulouse pour qu’il en assure la promotion. Cette étude a pour but d’étudier l’effet de l’ocytocine sur les troubles du comportement et sur le comportement alimentaire, sur le métabolisme cérébral, sur les fonctions cognitives et exécutives et sur les taux de ghreline circulante.
Une demande de complément de financement a été déposée à l’ANR (Agence Nationale de la Recherche) en avril 2013. Pour pouvoir commencer cette étude rapidement, une avance de ce financement est proposée par l’association PWF.
La France est pionnière dans cette recherche et peut coordonner un projet de recherche novateur et ambitieux sur l’utilisation thérapeutique de l’ocytocine. Les soignants et les chercheurs impliqués dans cette maladie ont choisi de travailler ensemble pour optimiser la recherche sur le rôle de l’ocytocine dans le SPW et son intérêt thérapeutique.
Nouvelles pistes thérapeutiques médicamenteuses
Le centre de référence collabore avec des laboratoires sur des perspectives thérapeutiques avec de nouveaux traitements, un laboratoire américain et un laboratoire français.
F. Muscatelli, D. Thuilleaux, V. Schaller et M. Tauber ont déposé un brevet pour l’utilisation thérapeutique de l’ocytocine et ses analogues comme thérapeutique dans le SPW. Les études réalisées chez l’homme et chez la souris ont permis au laboratoire Ferring d’obtenir le label de médicament orphelin pour un dérivé de l’ocytocine la carbétocine, mais à notre connaissance, ce laboratoire n’a pas encore débuté un protocole de recherche clinique.
Recherche en psychologie
– L’hôpital marin de Hendaye travaille sur les troubles des fonctions exécutives depuis quelques années avec l’université de Bordeaux, Victor Ségalen (Pr Virginie Postal). Un projet de recherche a été soumis à la Fondation Maladies Rares en collaboration avec le centre de référence et Prader-Willi France en 2013.
– A Toulouse, les Pr Michèle Guidetti et Bernadette Rogé ont soumis à l’ANR, en collaboration avec le centre de référence de Toulouse, un projet de recherche sur les troubles de l’identification des émotions chez les enfants SPW et les enfants autistes, et sur la mise en place d’une rééducation spécifique.
Recherche physiopathologique
Projet européen financé par la société européenne d’endocrinologie pédiatrique (ESPE) en 2011 et coordonné par la France.
Ce projet va permettre la mise en place d’une banque de prélèvements sanguins chez les enfants SPW de 0 à 4 ans et chez des enfants contrôles de même âge, dans 6 pays européens, et la France (M. Tauber coordonne ce projet). Nous voulons étudier les variations endocriniennes et métaboliques qui pourraient être à l’origine de la transition des phases nutritionnelles allant du déficit de succion et faible prise de poids à l’excès de prise de poids avec hyperphagie. 200 enfants avec SPW et 200 témoins seront inclus.
La sensibilité hormonale et le métabolisme du tissu adipeux chez les patients avec SPW
Ce projet est le versant fondamental du PHRC sensibilité à la GH : nous étudions in vitro sur des cellules de patients, la sensibilité à différentes hormones, GH, IGF-1, insuline, ghreline, et les mécanismes impliqués dans cette sensibilité. Nous étudions aussi les caractéristiques du tissu adipeux de ces patients chez l’enfant à Toulouse et chez l’adulte à Paris (C. Poitou, équipe INSERM U872 Nutriomique, Pr Clément). L’équipe INSERM UMR 1043 dirigée par Jean Pierre Salles en lien avec le centre de référence de Toulouse collabore pour ce projet avec l’unité INSERM UMR 1048 et les équipes de P. Valet et A. Bouloumié à Toulouse.
Dans ce cadre-là, nous travaillons aussi en collaboration avec des équipes américaines sur la préparation de cellules iPS (cellules souches pluripotentes induites) qui seront secondairement transformées en neurones dopaminergiques à partir de fibroblastes d’une patiente très particulière.
Nous collaborons aussi avec le Dr Anne-Marie Francois-Bellan, CNRS UMR 7286 et les Dr Rachel Reynaud et Thierry Brue à Marseille, sur les troubles du rythme nycthéméral dans le SPW.
Physiopathologie des troubles du comportement alimentaire
Le projet de recherche de M. Tauber dans le cadre de son contrat d’interface INSERM est en lien direct avec les essais thérapeutiques. Il s’agit d’étudier les anomalies entre ocytocine/ghreline /dopamine dans le SPW.
Les interactions avec l’équipe INSERM U901de Françoise Muscatelli (Institut de Neurobiologie de la Méditerranée (INMED)) qui travaille sur des modèles animaux SPW sont essentielles et permettent de confirmer des hypothèses de la souris à l’homme et de l’homme à la souris.
Les études sur l’imagerie cérébrale sont réalisées en collaboration avec le Pr Pierre Payoux dans l’unité INSERM U825 « Imagerie et handicaps Neurologiques » à Toulouse.
La collaboration mise en place récemment avec Pascal Barone, directeur de recherche dans le laboratoire Cerveau & Cognition, UMR CNRS 5549, CERCO, nous permet d’étudier les capacités perceptives (vision, audition et fusion sensorielle) des patients SPW et l’influence de certaines thérapeutiques comme l’ocytocine sur ces compétences. Ceci permettra de mettre en évidence d’éventuels troubles d’intégration multimodale chez les patients SPW qui pourraient traduire une difficulté à percevoir leur environnement comme un ensemble cohérent.
Grâce au conseil scientifique de l’association Prader-Willi France et à nos rencontres fréquentes, les 4 sites du centre de référence potentialisent leurs expertises et leurs recherches.
Les centres de compétence sont des collaborateurs motivés et très réactifs dans les protocoles de recherche clinique. Le tout se déroulant dans un climat de confiance et d’efficacité, nous pouvons étudier dans une approche holistique différents aspects importants en recherche clinique (génétique, psychologie et neuropsychologie) et imagerie cérébrale.
Les discussions et les échanges fréquents avec les Unités INSERM et CNRS complètent l’approche mécanistique et physiopathologique au niveau cellulaire, moléculaire et sur les modèles animaux. Nous sommes en liens et collaborons avec les équipes internationales.
La recherche en France est dynamique et a de nombreux atouts.
Maithé Tauber